Matthieu : « Certaines personnes parlent d’une fatigue de la compassion, le « burn-out ». Mais pensez-vous que l’amour, la bienveillance, la compassion puissent réellement se fatiguer ? »
Jean Vanier : « Lorsque je rencontre une personne avec un lourd handicap, qui me regarde avec une telle tendresse, cela fait bouger les choses. Le « burn-out » vient lorsque l’on est trop actif et que l’on ne passe pas assez de temps avec ces personnes. Il faut aussi bien former les gens qui travaillent dans nos communautés. L’être humain a cette tendance de vouloir « faire des choses, faire des choses», et ne prend pas assez de temps. Il y a donc toujours un danger de devenir trop actif au lieu de trouver la nourriture profonde du cœur. Il faut prendre le temps de l’intériorité. Il faut écouter la voix intérieure. Il faut savoir aimer avec sagesse, être intelligent avec le cœur. La contradiction ne peut venir que si l’on ne réalise pas l’unité entre le cœur et l’intelligence. Les gens sont heureux si vous prenez le temps de les écouter. Il faut créer une atmosphère de confiance. Créer des choses humaines demande une bonne tête, mais cette tête ne doit pas être séparée du cœur.
« La France est un petit bout dans un vaste monde qui risque d’exploser en raison de la disparité entre le monde des riches et des pauvres. Il faut que chacun d’entre nous apprenne à grandir, fasse de son mieux. Il faut mettre ensemble notre tête et notre cœur.
« Mon mot de la fin c’est « N’ai pas peur, tu es plus beau que tu n’oses le croire. »
Lors de cette même table ronde, à l’Université d’été du MEDEF, Sophie Cluzel (qui a fondé une association s’occupant de l’insertion des personnes handicapées à l’école et dans l’entreprise) racontait l’histoire d’une entreprise avait engagé une personne trisomique à la réception principale de ses bureaux. La présence de cet handicapé avait profondément transformé, de manière très positive, les relations interpersonnelles régnant dans ce lieu de travail et de vie.